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Achaq :  Mustafa Alaoui est un monument de sagesse et de conscience nationale

Un grand nombre d’érudits, d’universitaires et de chercheurs se sont récemment réunis à Meknès pour rendre hommage au regretté savant Mustafa Ben Ahmed Alaoui (1912–2007), à l’occasion d’un colloque scientifique consacré à son parcours intellectuel et à sa contribution remarquable à la pensée religieuse marocaine.

Dans son allocution, Abdelhamid Achaq, Directeur de « Dar Al Hadith Al Hassania », a souligné que feu Alaoui était une figure unique, alliant lutte nationale et réforme éducative et scientifique. Il a souligné sa contribution au développement de l’enseignement religieux et à la consolidation du statut de « Dar Al Hadith Al Hassania », qu’il a dirigé et y enseigné pendant de nombreuses années.

Achaq a souligné que l’influence scientifique du regretté savant s’est étendue au-delà du Maroc, jusqu’en Afrique, où il a joué un rôle majeur dans le renforcement des relations spirituelles et scientifiques avec plusieurs pays africains.

Ce colloque, organisé par le Conseil scientifique local de Meknès et le Centre de documentation et d’activités culturelles de la direction régionale des affaires islamiques de la région Fès-Meknès, en partenariat avec la direction régionale des affaires islamiques, s’inscrit dans le cadre de la valorisation de l’héritage des pionniers de la pensée et de la science au Maroc, et de l’incarnation de la culture de reconnaissance de leurs contributions à la consolidation des valeurs de modération et d’unité nationale. 

Achaq a prononcé à cette occasion un discours traçant le parcours du regretté dont voici la teneur :

Au nom de Dieu, le Tout clément, le Très Miséricordieux.

Monseigneur Mustafa Alaoui : monument de la sagesse et de conscience de la nation.

Excellences, Éminences et Altesses, honorables savants, dignitaires, doyens, présidents et aimants du Cheikh, de ses fils et de ses disciples,

Je vous salue d’une salutation pleine d’affection et de sentiments profonds, que je transmets en mon nom personnel et au nom du corps enseignant et estudiantin de « Dar al-Hadith al-Hassania », qui, à travers les âges, n’ont cessé de citer son fondateur, Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu le bénisse, qui a fait de cette grande école un édifice au service de la Sunnah prophétique et aux sciences de la charia dans cette nation bénie.

Je suis venu à vous comblé de toutes les impressions et souvenirs, que je porte en moi des recoins de cette école, souvenirs qui racontent la vie de ceux qui se sont succédé à la diriger et a porter son étendard, dont le noble érudit et réformateur Moulay Mustafa al-Alawi, que Dieu illumine sa tombe. Ce fut un parcours riche en services rendus à la nation, à ses dirigeants et à son peuple, dans le cadre de l’éducation, de l’enseignement et de la réforme.

Chers et honorables messieurs :

Votre présence à cette réunion est une occasion propice au renouvellement de l’alliance, de la diffusion de l’amour et de l’amitié, et de la reconnexion des successeurs avec leurs prédécesseurs. Toujours est-il que  Je reconnais la majesté du moment, avouant que les mots sont incapables de rendre  justice à un homme comme le noble et savant érudit Moulay Mustafa bin Ahmed Al-Alawi, et que les mots ne peuvent décrire ses mérites et ses vertus. C’était un homme en qui sont réunis les qualités dispersées chez d’autres : Érudition unique et esprit de réforme nationale ainsi que d’autres qualités. Me voici ne citant que quelques qualités de notre estimé professeur, figure éminente de sagesse et de conscience patriotique :

Premièrement : les guidances de la Sagesse :

Les signes du génie du Cheikh furent évidents lorsqu’il mémorisa l’intégralité du Saint Coran à l’âge de dix ans, sous la tutelle de son père. Il apprit ensuite auprès de son même père ainsi qu’auprès d’autres juristes de son pays; diplômés de l’universrté « Al-Qarawiyyin » ;  les fondements du savoir et les principaux textes religieux et, Suivant la coutume de ses compatriotes, il se rendit à Fès en 1931 pour apprendre de ses grands savants, jusqu’à l’obtention en 1945 du grand diplôme d’ »al alamiya » ; équivalent du doctorat.

Concernant Al-Qarawiyyin, il la glorifie de louange en déclarant : « Cette ancienne et glorieuse mosquée-école scientifique, rayonnant de lumière musulmane pour la nation islamique, rayonnant du nord au sud, illuminant le continent africain et l’Europe occidentale. Grâce à son rayonnement, des nations et peuples ont suivi les préceptes de l’islam. Ses gloires ont été inscrites dans les pages de l’histoire en lettres lumineuses. Ainsi, elle a continué à fournir aux générations futures les préceptes musulmans depuis sa construction par les premiers croyants, il y a douze siècles dans l’histoire de l’islam».

 Il ne m’est aucunement nécessaire de vous rappeler la grande faveur que cette mosquée, l’Université d’Al-Qarawiyyin, a bonnement octroyé à nombre d’entre nous. Puisque nous avons appris dans l’enceinte de cette mosquée- université, les sciences du Coran, de la Sunna et de la jurisprudence auprès de nos cheikhs (que Dieu les agrée). Dans ses cours, nous avons appris la grammaire, la rhétorique, l’astronomie, la littérature, la géographie et l’histoire. Nos ancêtres pieux y ont étudié toutes les branches du savoir jusqu’à ce que notre pays soit frappé par l’invasion coloniale, qui cherchait à remettre en question la validité de ce que nous avions appris de ce grand bastion historique « Alqarawiyne » (l’université).  

Le Cheikh a ensuite enseigné dans plusieurs instituts et institutions universitaires, notamment à l’école du professeur « Sidi Ibrahim al-Kattani » de « Tal’a al-Kubra » à Fès, à l’école « Hassania » de Fès depuis sa création en 1943 et à l’école « Nahda al-Islamiyya » de Meknès. L’un des signes les plus marquants de son prestige national et intellectuel dans le pays est peut-être le fait qu’il ait reçu la haute confiance royale en étant nommé directeur de la Fondation « Dar al-Hadith al-Hassania » du 1er novembre 1966 à 1976. À cette époque, il enseignait l’interprétation du coran et le hadith, et assurait des fonctions de supervision et de formation. Ainsi qu’il participait aux débats concertants les recherches universitaires.

Il a ensuite été nommé président du Conseil scientifique de Meknès, qui englobait à l’époque la région de Meknès et ses environs ; de 1981 à 2000, et été membre du Conseil scientifique supérieur.

Deuxièmement : Cheikh Moulay Mustafa Alaoui, directeur de « Dar Al Hadith Al Hassania ».

Comme indiqué précédemment, Cheikh Moulay Mustafa Alaoui a été nommé directeur de cette grande école par Sa Majesté Hassan II – que Dieu lui accorde Sa miséricorde –succédant ainsi au Cheikh Khalil Al Warzazi, et ce depuis le 1er novembre 1966 jusqu’en 1976.

Durant son administration, la maison a parachevé la constitution de tous ses statuts administratives et organisationnelles :

Puisqu’à la suite de la publication le 11 Joumada al-ula 1388 AH (6 août 1968 après J.-C.), du décret royal établissant la création de l’école « dar el hatith al hassaniya » le cadre juridique a été renforcé par le décret ministériel n° 273.162 du 29 Safar 1393 AH / 4 avril 1973 après J.-C., qui a précisé la liste des certificats nationaux délivrés par l’école comme si-suivant :

  • Diplôme d’études supérieures en sciences islamiques et hadith.
  • Doctorat en sciences islamiques et hadith (doctorat d’État).

Par la suite, le 18 décembre 1973, le ministre des Affaires administratives a publié la décision n° 1204/73, classant « Dar al-Hadith al-Hassania » entant qu’établissement d’enseignement supérieur.

L’un des événements les plus heureux de sa prospérité fut le transfert de son siège à son nouveau locale à « Diour al-Jamae » Ce luxueux palais, appartenant à Hajj Idris al-Bahrawi, que Dieu lui accorde sa miséricorde, fut doté le 13 Sha’ban 1390 de l’Hégire (15 octobre 1970) ce messène a offert ce grand palais pour  le service du hadith et du Coran. Son œuvre a eu un impact profond, tant en prose qu’en poésie. Parmi ceux qui ont enregistré cet exploit figure le professeur Moulay Mustafa Al-Alawi dans un article intitulé « L’impact du waqf sur la consolidation des piliers de l’islam », publié dans la revue Al-Irshad dans son premier numéro de la quatrième année, Dou al-Hijjah 1390 AH/février 1971. Le mufti de Tripoli, l’éminent érudit et écrivain Cheikh Nadim al-Jisr, a lu cet article et l’a orné de vers poétiques publiés dans la même revue, louant cette œuvre.

Durant son mandat, que Dieu lui fasse miséricorde, l’enseignement des matières académiques a été confié à d’éminents professeurs issus d’une génération de maîtres de la jurisprudence islamique au Maroc. Parmi eux figuraient les trois doyens des facultés de l’Université Al-Qarawiyyin : le professeur Jawad al-Sqalli, le professeur al-Tahami al-Wazzani et l’éminent savant « Rahal Farouk », en plus d’un groupe d’éminents universitaires, tels que le professeur Allal al-Fassi, le cheikh al-Makki al-Nassiri, le professeur Nasir al-Din al-Kattani, le professeur Abdelaziz Benabdallah, le professeur al-Abid al-Fassi et d’autres.

Ce corps professoral a été renforcé par le recrutement de professeurs étrangers, tels que le professeur Omar Baha’ al-Din al-Amiri, le professeur Mamdouh Haqi, la professeure Aisha Abdel Rahman, entre autres.

Le corps professoral a également été renforcé par des professeurs diplômés de cette institution elle-même ; notamment : le professeur Abdullah Shaker, l’érudit Muhammad Hammad al-Sqali, le Dr Ibrahim bin al-Siddiq et d’autres.

Et durant son mandat, que Dieu lui fasse miséricorde, 254 étudiants ont obtenu leur diplôme en provenance du Maroc et de diverses parties du monde, notamment de Jordanie, de Syrie, d’Inde, de Yougoslavie, d’Indonésie, de Tunisie, de Palestine, de Malaisie, du Niger, etc.

Les travaux des diplômés durant son mandat ont abouti à la rédaction de plusieurs projets de thèse de troisième cycle en sciences islamiques et hadith. Ces projets ont également donné lieu à des thèses de doctorat en sciences islamiques et hadith (doctorat d’État), qui ont ensuite été soutenues sous la direction de son successeur le professeur Muhammad Farouk Al-Nabhan.

Afin de mieux assurer la qualité des recherches, le savant Moulay Mustafa Alaoui, en sa qualité de directeur de l’école, a fait appel à des professeurs pour encadrer les débat autour des recherches, tels que Mamoun Al-Kazbari, Ali Abdel Wahid Wafi, Amjad Al-Tarabulsi, Ibrahim Harakat, Abdelhadi Al-Tazi, et d’autres.

Il conviendrait aussi de noter que, sous son mandat béni, l’Association des savants diplômés de Dar al-Hadith al-Hassania a été créée le 28 juin 1967.

Ses membres ont mené des activités notables, notamment :

  • Donner des leçons hassani devant Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu lui fasse miséricorde, notamment Cheikh Muhammad al-Tayeb, le professeur Muhammad Hammad al-Sqali, le professeur Ahmad Sahnoon, le savant Muhammad Youssef, le professeur al-Hasan al-Abbadi, et d’autres.
  • Donner régulièrement des cours et des conférences sur le Hadith et la jurisprudence dans leurs villes de domiciliation. Quarante diplômés de l’établissement ont participé à une campagne de sensibilisation et d’orientation auprès des manifestants de la Marche Verte pendant leur campement à Marrakech en 1975.
  • . »Publication des numéros du magazine « Al-Itisam

Troisièmement : Caractéristiques du nationalisme et de la réforme sociale.

Ce qui distingue la personnalité du Cheikh de celle de nombreux érudits et nationalistes de son époque, c’est son projet de réforme, fondé sur l’utilisation de la dimension scientifique – tant entant qu’enseignant qu’entant qu’encadrant– dans l’action nationale dans la lutte contre le colonisateur. C’est ce qu’Il a explicitement déclaré : « Les écoles scientifiques libres étaient des casernes autour desquelles se concentraient les activités politiques et sociales nationales, ce qui a conduit à la résistance au colonialisme dans tous les domaines de son comportement et de sa politique. L’œuvre de Sa Majesté le Roi Mohammed V, que Dieu lui accorde Sa miséricorde, a eu un impact considérable sur l’influence de l’École de la Renaissance islamique sur le progrès du mouvement national dans cette ville et cette région. Ceci est bien connu de la plupart de messieurs présents et de ceux qui ont vécu cette période de lutte du peuple et de son roi, que Dieu sanctifie son âme» .

Il a aussi déclaré dans un autre contexte : « C’est l’Université d’Al-Qarawiyyin qui a formé ceux qui ont commencé à s’unir pour libérer le pays du colonialisme, comme nous le verrons plus loin. (…) Ces écoles coraniques transformées en écoles primaires gratuites étaient perçues comme une menace par les colonialistes qui contrôlaient le pays à l’époque. Ils les considéraient comme des écoles militaires, ou plutôt des casernes remplies d’hommes qu’ils craignaient pour leur perdurance au Maroc, en plus de l’Université d’Al-Qarawiyyin, d’où étaient formés les officiers de ces camps.»

L’éminent juriste semble s’être inspiré dans cette démarche de la vision de Sa Majesté Mohammed V, que Dieu le bénisse, visant à établir des institutions légitimes et à endiguer la stratégie coloniale hostile. Il énumère ainsi plusieurs de ses initiatives, notamment : la réglementation des études à l’Université Al-Qarawiyyin, en les organisant selon un modèle moderne en trois cycles : primaire, secondaire et supérieur.

Ajoutons à cela son souci, que Dieu lui accorde sa miséricorde, de créer des sources modernes et structurées de culture arabo-islamique aux niveaux primaire et secondaire, en créant des écoles gratuites de culture islamique. Il encouragea cette démarche par son action. En 1943, il ordonna au ministère des Habous la construction de quatre écoles primaires à Fès, Rabat, Casablanca et Marrakech. En 1945, il fonda, à ses frais et de ses propres fonds, une école gratuite à Meknès, l’école islamique Nahda.

Cette œuvre eut un grand impact, car de nombreuses personnes riches de son peuple entreprirent de suivre ses pas en construisant des écoles arabes dans diverses villes et villages. Il ne fait aucun doute que certains de nos frères qui ont parcouru se même chemin se souviennent du résident général « Nogues », prononçant sur la place de l’hôtel Najjarin, ici à Fès, un discours menaçant. Il déclara : « Ce que je crains le plus pour l’existence de ma nation, la France, c’est cette chambre obscure. » désignant notre mosquée-l’Université d’Al-Qarawiyyin, source de lumière et de savoir depuis des siècles. C’est le témoignage d’un adversaire acharné, Il est à noter que la vertu est toujours le contraire du témoignage des ennemis.

Lorsque l’on constate que la lutte politique contre le protectorat a débuté en 1930, avec le mouvement « Latif » en réaction au dangereux décret berbère, on mesure la véracité du témoignage du résident général. Ce fut un chapitre sombre pour lui et pour la politique de son État colonial, qui cherchait à conserver le contrôle du pays indéfiniment. Il poursuit : «C’est de là que s’est formé le noyau du mouvement national connu sous le nom de « Bloc d’action nationale« , qui s’est cristallisé en 1936 pour donner naissance au Parti national et au Mouvement nationaliste». Ainsi, Mohammed V a ouvert la voie à la lutte, et l’a mené avec sagesse, courage et bonne gestion pendant vingt-cinq ans jusqu’à son retour victorieux de l’exil, portant l’étendard de l’indépendance, remerciant Dieu Tout-Puissant.

 Et, suivant les traces de ses ancêtres, le Commandeur des Croyants, Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le glorifie, a ordonné la réorganisation de la Fondation « Dar al-Hadith al-Hassania », répondant ainsi à la ferme volonté royale de poursuivre le renouveau religieux. Ceci s’est concrétisé par la réforme de ses structures et la réhabilitation de ses institutions afin de leur permettre d’exercer efficacement leurs responsabilités scientifiques et pédagogiques, notamment en formant des générations de savants capables d’ijtihad et de présenter la véritable image de l’islam.

Sa Majesté a également ordonné la création de nouveaux instituts et institutions pour approfondir les études islamiques sous toutes leurs formes, dont l’Institut Mohammed VI de Lectures et d’Etudes Coraniques.

Parmi les réalisations du regretté savant, que Dieu lui accorde sa miséricorde, figure son rôle dans la création du chantier Royal Stratégique pour l’Ouverture sur l’Afrique ; où sa Majesté Hassan II l’a nommé à la présidence de l’Association des Savants du Maroc et du Sénégal en 1985. Il fut ainsi l’un des savants qui œuvrèrent sans relâche au renforcement des liens scientifiques, spirituels et culturels entre le Maroc et les pays du Sahel au sud du Sahara. Rappelons que cet homme honorifique fut nommé chef de la Direction du Sahara au ministère de l’Intérieur, puis directeur du département politique au ministère du Sahara et de la Mauritanie.

Ce chantier, qui a pris racine et s’est révélé évident  puisqu’il a bien porter ses fruits, a connu un profond impact, grâce au leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, notamment dans le domaine scientifique, à travers des institutions et des projets pionniers, au premier rang desquels la Fondation Mohammed VI pour les Oulémas Africains, et la formation et l’encadrement ultérieurs de chercheurs et d’imams africains.

C’était là quelques fragments d’épopées nationales écrites par le savant Moulay Mustafa Alaoui et ses pairs. Par lesquels on peut conclure que les savants marocains ont toujours été à l’avant-garde de la résistance et du militantisme, guidés par la sagesse des rois de ce noble État. Que Dieu le préserve et perpétue son ombre majestueuse. Merci de votre écoute. Que la paix soit sur vous.

 Notre dernière invocation est que toutes les louanges soient à Dieu, Seigneur toutpuissant et omniscient.

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