Le Royaume du Maroc: terre de tolérance e carrefour du dialogue religieux

Par Halima Sbibih , Docteur en littérature anglaise, romancière, ancienne enseignante vacataire à la faculté des lettres de Meknes.
Les premiers contacts entre l’islam et le christianisme n’ont pas toujours donné lieu à des affrontements; au contraire, l’Islam et la Chrétienté connurent l’un des épisodes les plus emblématiques de leur histoire lorsque sur ordre du Prophète Mohammed, Paix et Salut soient Sur Lui, les Musulmans fuyant les persécutions, quittèrent la Mecque et trouvèrent refuge auprès du Négus, le Roi chrétien de l’Abyssinie. Il s’agissait là du premier acte d’accueil et de connaissance mutuelle entre religions musulmane et chrétienne. C’était un acte de connaissance mutuelle, inscrit dans la postérité et que Sa Majesté le Roi Mohammed VI et le Pape Jean François ont commémoré le 30 et 31 Mars 2019 à Rabat, transformée, pour l’histoire, en capitale du dialogue interreligieux.
Les exemples de dialogue interculturel qu’avaient illustrés les quatre périodes connues sous le nom de convivencia en Espagne, de711à 1492, où encore l’époque ou François d’Assise s’interposa avec succès entre les chrétiens et les musulmans lors de la cinquième croisade, se basaient , à partir de la Renaissance du XIIe siècle, sur un fondement philosophique clair: Pierre Abélard1 avait rédigé en 1142 le Dialogue entre un philosophe, un juif, et un chrétien, qui resta inachevé. Le philosophe dont il s’agissait était probablement un musulman. Abélard mit ainsi en scène trois monothéistes, pour qui il existe un Dieu unique. Il était en quête de tolérance religieuse, et chercha un noyau commun profondément ancré dans les cultures des trois religions abrahamiques que sont le christianisme, le judaïsme et l’islam, permettant d’établir une véritable communication.
Au xixe et xxe siècles, l’important développement des moyens de transport et de communication a permis des échanges culturels qui, s’ils ne facilitaient pas le dialogue interreligieux, en jetaient les bases. L’apport des travaux ethnologiques dans les années 1950 et la décolonisation favorisent le dialogue islamo-chrétien dont les principaux précurseurs sont Louis Massignon, Jean-Mohammed Abd-el-Jalil, Louis Gardet et Georges Anawati2.
À la suite de la conférence de Seelisberg, organisée en 1947 pour étudier les causes de l’antisémitisme chrétien, les catholiques sentirent l’urgente nécessité de revisiter de fond en comble la relation qu’ils avaient avec les autres religions. Un Conseil pontifical pour le dialogue inter-religieux a été érigé par le pape Paul VI le 17 mai 1964.
Le thème du dialogue interreligieux fut, avec l’œcuménisme, l’un des thèmes évoqués lors du concile Vatican II entre 1962 et 1965, ce concile restant cependant marqué par la théologie de l’accomplissement selon laquelle les religions non chrétiennes jouent le rôle de « préparation évangélique », le Christ venant « accomplir » tous les éléments de vérité contenus dans les religions.
La déclaration Nostra Ætate est le document qui assied les nouvelles relations entre les catholiques et les juifs, musulmans, bouddhistes et hindous.



